De nouveau cet été, je n’ai pas pu résister à tendre mon micro du côté des chiens d’assistance pour de nouveaux hors-série de l’été ! Pour ce troisième hors-série, je ne vous présente ni un bénéficiaire, ni un bénévole, mais Stéphanie qui est la référente de Mayotte, une chienne d’assistance médiateur formée par l’association des chiens médiateurs et d’utilité de l’Est. Cette chienne vous dit quelque chose ? Il s’agit en effet de l’élève chien guide qui était en famille d’accueil chez Audrey de l’épisode 8, qui comme elle nous avait expliqué avait été finalement réorientée. Ainsi, depuis quelques années maintenant Mayotte agit aux côtés de Stéphanie et de son équipe en tant que chien médiateur. Mais quel est son rôle finalement ? Stéphanie nous raconte comment elle a essayé de mettre en place ce projet avec son chien de famille tout d’abord, puis suite à l’incompatibilité de son chien avec ce rôle, comment elle a découvert l’association des chiens médiateurs et d’utilité de l’Est. Elle nous raconte aussi comment Mayotte intervient au quotidien dans la résolution des conflits mise en place au sein de leur structure associative Impulsion 54.

Retrouvez la transcription intégrale en fin de page.  

Transcription intégrale

 

Estelle

Bonjour et bienvenue sur le podcast futur chien guide, le seul podcast sur l’univers des chiens guides d’aveugles soutenu depuis cette année par la FFAC et l’ANM Chiens Guides. Je m’appelle Estelle. Je suis passionnée par les chiens guides d’aveugles et bénévoles pour cette cause à Paris. Je suis d’ailleurs persuadée que l’univers des chiens guides d’aveugles mérite d’être mieux connu. En tant qu’amoureux des chiens, futurs bénéficiaires ou autres curieux comme moi, vous croisez parfois des chiens guides d’aveugles et leurs maîtres en vous demandant : « Mais comment font-ils pour se déplacer dans nos rues toujours plus agitées ? ». Ce podcast est le seul qui vous propose, au fil de rencontres enrichissantes, de décrypter l’univers des chiens guides d’aveugles pour comprendre par qui et comment ils sont éduqués, mais aussi de découvrir leur rôle dans le quotidien de leur maître et les bouleversements à leur arrivée, ou encore comment agir quand vous croisez un tel binôme ? De nouveau, cet été, je n’ai pas pu résister à tendre mon micro du côté des chiens d’assistance pour de nouveaux hors série de l’été. Pour ce troisième hors série, je ne vous présente ni un bénéficiaire, ni un bénévole, mais Stéphanie, qui est la référente de Mayotte, une chienne d’assistance médiateur formée par l’Association des Chiens Médiateurs et d’Utilité de l’Est.

Cette chienne vous dit quelque chose ? Il s’agit en effet de l’élève chien guide qui était en famille d’accueil chez Audrey de l’épisode 8 qui, comme elle nous l’avait expliqué, avait été finalement réorienté. Ainsi, depuis quelques années maintenant, Mayotte agit aux côtés de Stéphanie et de son équipe en tant que chien médiateur. Mais quel est son rôle finalement ? Stéphanie nous raconte comment elle a essayé de mettre en place ce projet, avec son chien de famille tout d’abord, puis suite à l’incompatibilité de son chien avec ce rôle, comment elle a découvert l’Association des Chiens Médiateurs et d’Utilité de l’Est. Elle nous raconte aussi comment Mayotte intervient au quotidien au sein de leur structure associative, Impulsion 54. Bonjour Stéphanie.

Stéphanie

Oui, bonjour Estelle.

E.

Merci d’avoir accepté cette invitation sur mon podcast Futur Chien Guide, même si aujourd’hui on va parler un peu de chien guide, mais pas forcément. Est-ce que tu peux pour commencer te présenter ?

S.

Oui, donc je suis Stéphanie Vautier. Donc je suis directrice d’une association qui emploie donc Mayotte, voilà, et je suis personnellement maman. On a sept enfants et quatre petits-enfants. Donc Mayotte est en contact régulier avec les enfants. Voilà.

E.

Et donc dans ton quotidien, en tant que directrice d’association, c’est une association sur quel champ à peu près ? Est-ce que tu peux nous en dire un peu plus sur ses missions ?

S.

Alors nous, notre association travaille avec le conflit familial. Alors dans un premier temps, la médiation familiale. Donc on suit des familles qui peuvent être en conflit. Donc on fait de la médiation parent-ado, on fait médiation de parents. On peut faire des médiations en situation de vieillissement, donc placement d’un parent âgé, héritage, succession. Et on a un autre service qui est l’espace rencontre. Donc c’est un espace qui accueille des parents qui ont été orientés par la justice pour reprendre contact avec leurs enfants. Et nous avons un autre service d’accompagnement à la parentalité. Donc là, c’est pas forcément le conflit. C’est essentiellement des parents qui se posent des questions par rapport à leur posture parentale, qui sont en difficulté avec leurs enfants. Et enfin un dernier service de thérapie de couple pour que le couple puisse avancer, en tout cas prenne confiance en lui pour pouvoir poursuivre sa route ensemble. Donc voilà.

E.

Ok, donc plein de missions très différentes. Et puis si on parle aujourd’hui dans ce hors série de l’été de Mayotte, notamment, Mayotte, ça doit dire quelque chose aux auditeurs puisque on a parlé de ce nom-là dans l’épisode 8 avec Audrey qui était sa famille d’accueil lorsqu’elle était élève chien guide pour l’Ecole des Chiens Guides de Paris. Mais toi, comment tu as connu Mayotte et comment, du coup, elle est arrivée dans ton quotidien professionnel et personnel ?

S.

Alors en fait, j’ai un autre chien qui est une chienne teckel poil dur et j’ai toujours cru en les bienfaits de l’animal auprès de l’humain pour rester zen. Et donc j’avais une teckel poil dur, enfin j’ai toujours une teckel poil dur, qui avait six mois et je pensais que la prendre au sein de la structure pour pouvoir travailler avec nous, enfin on sait que ça pouvait être intéressant et en fait, il s’est avéré qu’elle est complètement asociale et que donc les personnes qui venaient à l’association, elle voulait les manger. Enfin les femmes, ça passait, les hommes un peu moins. Donc au bout de trois mois, on a dit on arrête parce que c’est pas la peine, il va y avoir un accident, donc on arrête ça tout de suite. Et c’est là que je me suis mis à rechercher ‘médiation animale’, qu’est-ce qui pouvait exister, et j’ai, j’ai trouvé sur Internet l’Association des Chiens Médiateurs et d’Utilité de l’Est. Donc je les ai interpellés. On est venu m’expliquer qu’il était possible en tout cas d’adopter, ou en tout cas d’avoir à disposition, puisque c’est une mise à disposition pour la structure, d’un ancien chien guide ou en tout cas d’un chien guide en formation pour accompagner dans le travail les professionnels. Et donc on a dit bon ben pourquoi pas tenter cette aventure en sachant que ben il fallait quand même demander l’accord de ma famille. Ben c’est pas anodin de recevoir un chien, surtout un golden retriever, enfin un gros chien, pas un teckel. C’est un golden retriever ou un labrador, en sachant que nous on avait déjà un labrador qui est mort au bout de quatorze ans et demi. Donc on sait un peu le volume que ça a et la place que ça peut prendre. Et donc j’ai vu Noémie, qui s’occupe de l’Association des Chiens Médiateurs, qui nous a expliqué un peu la démarche. Donc on a monté tout un projet autour de l’animal, surtout pour la reprise de lien entre le parent et l’enfant et pouvoir être zen dans cet espace où on est en conflit. En tout cas que le chien amène, qu’il joue ce rôle de…

E.

de facilitateur un peu….

S.

…de relation, voilà. Et donc on a monté ce projet, il a été validé. Et Noémie est venue nous présenter Mayotte, qui est arrivée, elle avait trois ans, décembre 2018 qu’elle est chez nous. Et donc ça a tout de suite matché et on l’a présentée à ma famille aussi. Et puis, aux collègues aussi, elle s’est adaptée. Donc ils nous l’ont laissée un mois déjà pour voir comment elle pouvait être dans les espaces, quand il y avait le ton qui montait, quand les personnes pleuraient, parce que étant donné qu’on travaille avec le conflit et les difficultés parentales, c’est vrai qu’on a des personnes qui sont énormément en émotion. Et donc elle nous avait dit Noémie, que Mayotte avait été réorientée pour être formée à la reconnaissance des émotions chez l’être humain et donc justement faciliter la relation et pouvoir être aussi à l’écoute dans tout ce que les personnes pouvaient exposer ou en tout cas ce qu’ils pouvaient ressentir. Et c’est vrai que dans les espaces ben, du coup, ça a très bien fonctionné. Donc oui, elle était, ben, à l’écoute. Elle venait quand le ton montait, elle vient poser sa gueule sur les genoux, les personnes la caressent, le ton baisse. Les personnes vont parler, beaucoup parler, ben elle va souffler. Des personnes pleurent, elle peut pleurer avec elles. Donc elle se met à pleurer. Et donc les personnes verbalisent beaucoup plus facilement leurs émotions en disant : ‘Le chien se rend compte, Mayotte se rend compte que je suis triste. Ah, je me rends compte quand elle souffle ben même le chien je le saoule’. Donc voilà. Donc c’est vrai que c’est des réactions qui permettent aussi les échanges. Alors après c’est pas une baguette magique non plus, hein. Mayotte, des fois elle a rien envie de faire et elle est couchée et elle ne va pas bouger. Voilà. Ou quand quelqu’un vient la chercher, puisqu’on est neuf professionnels, donc elle est dans les espaces avec les différents professionnels et des fois, quand elle a pas envie, elle se cache dans mon bureau pour dire ‘venez pas me déranger, j’ai pas envie’.

E.

Est-ce que du coup son rôle au sein de la structure, il n’est pas uniquement auprès de toi ? Tu nous parlais un petit peu de l’implication de ta famille parce que de fait, Mayotte ne dort pas au bureau. Elle rentre chez toi le soir et comme tu disais, c’est une mise à disposition, c’est-à-dire qu’elle n’est pas, vous n’êtes pas propriétaires de Mayotte. C’est un petit peu comme les chiens guides, c’est toujours l’Association des Chiens Médiateurs de l’Est, dont Noémie est la responsable, qui est donc propriétaire de Mayotte. Et pour le coup, le soir, elle a quand même une maison et pour le coup, c’est chez toi.

S.

Voilà. Et c’est vrai que du coup, on a vraiment totalement confiance en elle puisque, alors par rapport à notre autre chienne qui est une teckel, le véto nous disait toujours ‘il y a les chiens, et puis il y a les teckels’. C’est des races très butées, voilà, qui ont un caractère vraiment à part. Et c’est vrai que vis-à-vis de nos enfants, alors qui sont grands, mais des derniers qui ont deux et quatre ans et les petits-enfants qui ont entre deux, enfin non trois semaines, et mais bon trois semaines, je la compte pas puisqu’elle pas en relation avec Mayotte, même si Mayotte est venue la sentir et tout. Mais les autres, c’est vrai qu’on a totalement confiance. Comme les enfants ici à la structure. Les enfants, c’est un repère, Mayotte. C’est vrai que, à la maison, voilà, Mayotte, elle est très demandée et elle est très à l’écoute de tout le monde. Et au travail, ben c’est vrai qu’elle passe dans les différents espaces. Nous, on a mis des affiches partout de Mayotte expliquant ce qu’est Mayotte, quel chien c’est, que bien entendu, il faut nous dire si les personnes ont peur, si elles peuvent ne pas l’accepter, si… Mais en règle générale, on a peut-être une ou deux personnes par an qui nous disent ‘non, attention, j’ai peur’ ou voilà. C’est vrai que sinon les enfants réclament beaucoup Mayotte en sachant qu’elle a un brassard, donc des chiens médiateurs, et que donc ben les enfants, certains demandent même à avoir Mayotte à côté d’eux, tiennent le brassard et vont dans l’espace rejoindre le parent avec lequel ils n’ont plus contact, avec Mayotte. Et ça les aide à pouvoir aller vers l’autre, ce parent-là qu’ils ne connaissent pas. Et dans l’espace on nous demande aussi à avoir Mayotte puisque en fonction des difficultés que rencontrent les personnes, ben Mayotte, elle va être à leur côté et c’est vrai qu’ils se sentent soutenus par la présence de Mayotte qui va pouvoir poser sa gueule, qui va pouvoir réagir en fonction des chiens, c’est un chien hein, mais elle peut souffler, pleurer, etc. Et c’est vrai que ça leur apporte beaucoup aux personnes. Oui.

E.

C’est vrai que moi je me souviens de Mayotte parce que alors on a fait l’épisode 8 avec Audrey, sa famille d’accueil qui l’avait eue elle en juin 2007 en deuxième famille d’accueil, comme ça peut être le cas, et j’avais eu l’occasion de la prendre en relais un ou deux week-ends, je crois que c’était, c’est sûr, en juillet 2017, et puis un autre week-end également. Et elle m’avait vraiment épatée parce que j’étais allée dans le Sud, dans ma famille et pour le coup, mon cousin venait d’avoir un chiot et elle avait été tellement adorable avec ce chien-là alors qu’elle pouvait tout à fait jouer normalement avec d’autres chiens. Mais elle était vraiment tolérante et consciencieuse avec ce petit chiot, à partager les jouets alors qu’elle ne le faisait pas forcément avec tous les autres chiens, mais vraiment dans la compréhension déjà canine et ensuite oui comme tu le dis, humaine. Donc voilà, c’est vrai que quand elle a pas pu finir son cursus au niveau des chiens guides, mais elle a eu une formation complémentaire auprès des Chiens Guides Médiateurs de l’Est, des Chiens Médiateurs, pardon, de l’Est, auprès de Noémie et ses collègues, parce que c’est pas un métier non plus, le métier de chien médiateur on va dire, tu disais qu’elle travaille pour toi, c’est des choses qu’elle a appris aussi. Il y a des choses qui sont innées, mais il y a des choses qu’on a renforcé et qu’on a positivé, ce qui fait qu’elle permet aujourd’hui aussi un meilleur contact avec l’humain.

S.

Oui, tout à fait, c’est ça. Alors après le gros problème qu’on a avec Mayotte et que tout le monde sait, c’est un peu compliqué de gérer, c’est qu’elle est gourmande. Donc elle a découvert autre chose que les croquettes. Et en fait, notre gros souci, c’est qu’elle a pris énormément de poids, donc elle a pris dix kilos. Donc autant dire que ça a été compliqué. Mon vétérinaire dit ‘il vaut mieux un chien bien dans sa tête qu’un chien frustré’, donc bon, ok. L’Association des Chiens Médiateurs, c’est pas ce qu’ils nous disent, mais du coup, c’est vrai que c’est compliqué parce que Mayotte fait également des groupes de parole pour les seniors, elle participe. C’est essentiellement des mamies du coup, et ils lui ramènent à manger. Donc c’est compliqué. Et les enfants, ben ils aiment bien la gâter et partager avec elle leur petit goûter. Donc gérer ça, c’est très très difficile. On essaie le plus possible. On avait réussi à lui faire perdre huit kilos, ce qui était pas mal vu qu’elle est en croquettes allégées et tout. Mais elle a repris quand même. Donc je pense qu’il y a des petites choses, voilà, qui sont faites sous le manteau parce qu’on a du mal à réguler ça. Donc c’est vrai que c’est compliqué, mais elle fait partie, comme étant un membre entier de l’équipe, et c’est vrai que même l’équipe ben voilà, quand c’est difficile ou quand on a des situations complexes, ils vont sortir avec elle, ils vont jouer avec elle ou ils vont la brosser. Et c’est vrai que ça permet aussi à l’équipe d’être bien dans le travail. Parce que moi, je peux partir en vacances ou des choses comme ça. Et plutôt que de la donner aux Chiens Médiateurs puisqu’il y a une possibilité pendant les vacances, ben elle va chez d’autres membres de l’équipe. Euh, on est deux autres membres de l’équipe à la prendre. Donc il y a une de nos médiatrices familiales qui la prend chez elle, et une des secrétaires qui la prend aussi chez elle pour justement pouvoir permettre qu’elle reste dans l’environnement où elle a l’habitude d’aller. Après, je reste quand même, c’est vrai, malgré tout, la fonction…

E.

La référente.

S.

La référente, voilà. Même si nous on dit ‘va chez ta maman’. Là, voilà, là elle est à côté de mon bureau, à côté de moi, même avec à mon mari, il la sort beaucoup, il peut jouer beaucoup avec elle, ou les enfants. Et c’est vrai que du coup, elle est dans son élément. On se rend compte que c’est vraiment une chienne bienveillante qui est à l’écoute, qui nous pose vraiment aucune difficulté.

E.

Et pour le coup, comment ça s’organise son emploi du temps, entre guillemets, entre vous ? Est-ce que vous faites le planning de Mayotte dans la semaine comme vous le faites pour vous, pour savoir où est-ce qu’elle vous accompagne ? Est-ce qu’elle vous accompagne également à l’extérieur de la structure ou pas du tout ?

S.

Oui. Alors, en extérieur, elle nous accompagne surtout pour les groupes de parole seniors, avec la collègue en maison en foyer d’autonomie. Et on a pu le faire aussi en maison de retraite, en EHPAD, et après elle peut aller à des rendez-vous extérieurs quand je suis une formation elle me suit, où je peux pas l’amener à la structure avant ou après. Du coup, elle vient avec moi durant la formation. Et c’est vrai que ça a toujours un effet assez incroyable sur les étudiants qui vont être beaucoup plus à l’écoute, beaucoup plus bienveillants. Donc ça, c’est intéressant.

E.

C’est vrai qu’elle allait, elle allait déjà beaucoup en cours puisque Audrey était prof côté artistique, mais c’est vrai qu’elle avait aussi cette relation avec des étudiants en fait, donc elle en retrouve parfois. C’est rigolo.

S.

Oui et après par rapport à la semaine, alors au niveau de l’espace rencontre, là elle y est. Donc quand il y a espace rencontre, elle est au sein de l’espace rencontre parce que c’est plus qu’une plus-value. Les enfants sont demandeurs, voilà. Donc moi je l’amène même les samedis au travail pour qu’elle puisse être présente au niveau de l’espace rencontre en sachant qu’elle a quand même des espaces dédiés sans les enfants. Parce que ça c’est important aussi parce qu’il y a énormément d’émotion. Et si elle a pas de possibilité de pouvoir s’en écarter un peu, c’est compliqué. Et après dans la semaine, ben, c’est en fonction de comment elle est, si elle va… C’est vrai qu’il y a certaines personnes, elle y va pas, donc elle ne va pas dans l’entrée quand ça sonne, elle n’y va pas, ou quand elle les croise, elle s’arrête même pas. Et d’autres, elle va être vraiment collée à eux. Alors on sait pas trop si c’est l’émotion qu’ils dégage ou ce qu’ils peuvent, voilà, renvoyer, qui fait qu’elle va s’en approcher plus ou moins. C’est vrai qu’on a pu remarquer ça… Pareil chez moi, mon voisin, j’espère qu’il écoutera pas le podcast, elle ne peut pas, elle l’aime pas trop, elle va pas s’en approcher, alors que sa femme, elle va y aller complètement. Voilà, on a des personnes comme ça qui…

E.

ça matche pas pas quoi.

S.

Ouais, ça matche pas. Pareil en séance, elle aura la possibilité, où toute la séance elle va être vraiment alerte et monter sur eux même quand il y a beaucoup, beaucoup d’émotion, et d’autres où elle va ronfler. Et elle en a strictement rien à faire de ce qui se passe dans cet espace-là, voilà. Donc c’est vrai que généralement elle est assez active, mais il peut y avoir des fois où elle a pas envie.

E.

Et est-ce que depuis 2018 du coup dans tes pratiques, il y a des choses qui ont changé de par l’accueil de Mayotte et la présence de Mayotte dans ton quotidien professionnel, par exemple ?

S.

On s’écoute un peu plus parce que, Mayotte, elle peut aller vers les personnes, mais elle peut aller aussi vers nous quand on est plus en émotion. Donc ça nous aide aussi à verbaliser ce qui se passe dans l’espace. Et ça, c’est vraiment, vraiment une plus-value. Ma collègue médiatrice familiale aussi le dit. C’est que vraiment, elle aide à pouvoir verbaliser ce qui se passe là dans cet espace-là, tant pour nous que pour les personnes. Donc ça, c’est vrai que c’est une plus-value. Et au niveau de l’espace rencontre, ben, beaucoup au niveau des enfants. C’est vrai qu’on se rend compte qu’elle est vraiment facilitatrice du dialogue, de l’échange et de la rencontre. L’enfant il va être beaucoup plus facilement à l’écoute et il va se sentir beaucoup plus en confiance à côté de Mayotte que seul. Même si un adulte qui est présent, hein, puisque l’animal, il n’y a pas de barrière en fait, c’est vraiment ce qui facilite la relation. Nous, on a pu voir, c’est vraiment quelque chose d’efficient.

E.

Tu as des histoires ou des anecdotes comme ça où Mayotte a débloqué, entre guillemets, des situations ?

S.

Ah oui, il y a une petite fille. Enfin, une petite fille, si une petite fille quand même, de neuf ans, qui avait pas vu son papa depuis plus d’un an et demi et où la rencontre était difficile. Et Mayotte est venue tout de suite dès l’entrée avec cette petite fille. Donc elles ont joué ensemble une bonne dizaine de minutes et après le papa est venu lui. La petite fille voulait pas bouger de l’entrée. Le papa est venu et en fait, ils ont commencé à caresser tous les deux, alors on a des paniers avec des jeux dedans, des brosses, etc., et le papa a entamé la conversation avec cette petite fille grâce à Mayotte en disant ‘ben, tu vois, t’aimes bien les chiens, tu le sais, moi j’en ai un, il s’appelle comme ça, alors je fais ça avec…’. Et du coup, ils ont commencé tous les deux à échanger par rapport au chien, ce qui a permis une rencontre plus facile, en tout cas, elle a été média entre les deux. Voilà. Après un mois en thérapie, un couple qui s’est vraiment effondré et où Mayotte a pu monter, alors elle est montée, alors bien entendu, toujours les personnes sont d’accord et on leur dit que si Mayotte fait quelque chose qui ne leur convient pas, ils peuvent le dire. Elle est montée sur, c’était madame, entre autres, qui pleurait beaucoup. Elle s’est mise à pleurer avec elle et elle a dit ‘même le chien me comprend, même le chien sait que là je suis en émotion et que c’est difficile pour moi’. Ça l’a aidée aussi à verbaliser ce qu’elle pouvait ressentir. C’est vrai que c’est vraiment vraiment intéressant. Et au niveau des groupes de paroles seniors, ils sont en attente toutes les semaines de l’arrivée de Mayotte pour la caresser, pour la sortir, pour la brosser. C’est assez impressionnant.

E.

C’est vrai du point de vue des seniors. Moi, j’ai eu l’occasion d’aller, alors de manière complètement personnelle, en EHPAD, voir ma grand-mère qui était là-bas ou en maison de repos post-opératoire, etc. Et que c’est quelque chose que j’ai vraiment envie de faire un jour dans ma vie, lorsque j’aurai un élève chien guide sur une durée un peu plus longue que les relais que je peux me permettre aujourd’hui. Parce que ce temps-là de contact en tout cas, permet beaucoup de choses et en effet ramène aussi des souvenirs. Et je me souviens avoir fait, c’était en été, donc on était dehors avec mamie et forcément il y avait d’autres personnes qui étaient par ici et on a fait le tour avec Nollie. C’était il y a tout juste quatre ans et en fait, ben voilà, chacun avait une caresse, un mot, alors que les gens ne sont pas forcément très enjoués d’être dans ces milieux-là et, de fait, ça ravive un petit peu le quotidien, juste par la présence d’un chien.

E.

J’imagine que du côté des seniors, c’est un rendez-vous attendu en tout cas.

S.

Oui oui oui, mais même après, personnellement, nos petits-enfants se couchent sur Mayotte, ils ont la tête et puis ils la caressent, ils tripotent. Enfin, c’est vraiment attendrissant. Et Mayotte, ben elle est où Mayotte, voilà ils la cherchent et c’est vrai qu’elle est toujours zen, quoi, très zen. Alors nous on voit la différence avec notre teckel qui elle n’est pas zen. Donc c’est vrai que c’est assez rigolo de voir les enfants être en attente de Mayotte et quand elle n’est pas là, ben elle est où Mayotte, quoi. Donc c’est vrai que c’est bien.

E.

Et même dans les histoires de chiens d’éveil-chiens médiateurs, qui sont des chiens médiateurs en fait entre la famille et l’enfant, parfois. On l’a vu dans les hors-série cet été il y a quelques semaines, et on l’a vu aussi l’an dernier dans les hors-série avec un chien d’éveil côté handichiens et les familles disent souvent ben la présence fait qu’on raccroche avec, avec l’enfant, alors qu’au final c’est parfois compliqué de se concentrer pour certains enfants et ça permet justement d’avoir l’intermédiaire, comme tu dis en disant, ben voilà le chien, la responsabilité du chien, même si l’enfant est toujours secondé d’un adulte comme j’imagine, tu nous le disais dans l’espace rencontre, c’est toujours le cas aussi.

S.

Oui voilà, mais c’est vrai que c’est vraiment un… alors ce qu’on dit c’est un outil de travail réellement pour nous et c’est un outil thérapeutique parce que ça facilite beaucoup de choses. Voilà, elle est pas là par hasard, c’est vraiment quelque chose d’intéressant et de constructif et de construit aussi avec l’équipe hein, puisqu’on a été formés six jours en éducation canine justement pour être à l’écoute. Et l’équipe a pu faire des petits posters aussi avec les différentes têtes du chien, ce que ça pouvait représenter si elle remue la queue, si elle s’étire, si les oreilles sont basses. Et c’est vrai que du coup, ça permet aussi de responsabiliser les gens qui sont dans cet espace vis à vis de Mayotte, et d’écouter aussi que des fois, elle a envie de sortir ou elle a envie de boire, ou ou elle a pas envie de rien faire et donc voilà, et de le respecter, ça c’est déjà très intéressant.

E.

Et par rapport à la présence de Mayotte, ça fait déjà presque quatre ans qu’elle est à vos côtés. Est ce que vous avez des projets qui ont été initiés par sa présence ? On va dire des choses qui sont nées vraiment de sa présence ?

S.

Ben les groupes de parole seniors, ça oui. La médiatrice familiale qui s’en occupe, je pense qu’elle aurait pas voulu le faire, peut-être en tout cas pas simplement, là le chien il est fédérateur et il y a une attente vraiment des personnes qu’elle va voir. Après, au niveau des espaces, c’est vrai que c’est vraiment très intéressant. Et au niveau de l’espace rencontre, on a des enfants qui là, faut… des fois, je peux dire ‘je la ramène pas, je suis fatiguée’. Et puis j’ai une grosse semaine, donc retourner le samedi au travail, c’est quand même… ça me demande beaucoup. Et c’est vrai que des fois, il y a des enfants, c’est obligatoire, il faut que Mayotte soit là, sinon on n’avancera pas, on fera pas, ils s’approcheront pas du parent. Et c’est vrai que ça, c’est vraiment une plus-value. Voilà, vraiment quelque chose d’intéressant.

E.

Mais en tout cas, on voit que Mayotte a pris et trouvé sa place auprès de toi et de toute l’équipe au final, mais aussi de toutes les personnes qui ont recours à l’association pour diverses situations. Et qu’elle devient membre à part entière avec ses quelques kilos en plus. Mais de fait, ça participe aussi à cette envie de la récompenser, de prendre soin d’elle. Et donc c’est un équilibre judicieux à trouver entre ces envies-là et son poids et sa santé. Mais bon, quand tout va bien, c’est de l’embonpoint mais tout va bien quand même, il faut y faire attention. Pour terminer, est-ce que tu peux nous raconter ton pire et ton meilleur moment avec Mayotte ?

S.

Je dirais, mon pire, c’est.. ça arrive souvent, c’est quand elle pète en séance et là il y a un blanc et tout le monde se regarde. Et là on explique que ben voilà, Mayotte, c’est comme tout le monde. Donc ça, c’est vrai que c’est délicat, toujours, voilà. Le meilleur moment, bah c’est quand même quand les personnes se saisissent de Mayotte et qu’elle peut monter sur eux, ou en tout cas rien que poser sa gueule quand ils sont en émotion, et la caresser, on voit le visage qui s’illumine quoi, il y a quelque chose qui se passe, qui se joue dans cet espace. Et il y a une prise en compte de ce que l’autre peut ressentir. Et ça, c’est vraiment fort.

E.

Et il y en aura encore plein d’autres j’imagine, puisque…

S.

Mais oui.

E.

Sa mission n’est pas finie à vos côtés de toute façon.

S.

Du tout, du tout. Ah oui, non là c’est pas fini encore.

E.

En tout cas, merci beaucoup Stéphanie de nous avoir raconté tout ça. J’avais hâte de connaître la suite de l’aventure de Mayotte après l’avoir suivie en tant qu’élève chien guide auprès de Audrey qui nous avait raconté ça dans l’épisode 8, après l’avoir eue aussi personnellement en tant que famille relais à la maison, et puis dans ma famille pour le temps d’un week-end. Je suis ravie. Je savais qu’elle allait bien, je savais qu’elle était dans l’Est et qu’elle était au service des Chiens Médiateurs de l’Est qui est une association dont je mettrai aussi les coordonnées puisqu’elle mérite vraiment d’être connue. Et puis j’ai recroisé Noémie du coup, début juin, et là, je me suis dit, au congrès des chiens guides, Noémie, il faut vraiment que tu me mettes en contact. Il faut vraiment qu’on sache la suite de l’histoire. Donc je suis ravie en tout cas que tu aies accepté et je te remercie pour ce temps d’échange avec moi.

S.

Mais merci à toi. En tout cas, c’est toujours très agréable de parler de Mayotte et de ce qu’on peut faire avec elle. Voilà donc, merci beaucoup.

E.

Je t’en prie et à très bientôt.

S.

Oui, au revoir. Merci.

E.

Et voilà, c’est la fin de cet épisode. Merci à vous de l’avoir écouté en espérant qu’il vous aura plus. Merci à Stéphanie pour son temps et son témoignage. Je suis tellement ravie de vous partager la suite de l’histoire de Mayotte en vous faisant découvrir son rôle actuel. Pour compléter votre écoute, vous pouvez retrouver sur futurchienguide.fr des photos de Stéphanie et ses collègues avec Mayotte, mais aussi de Mayotte dans son quotidien et plus d’informations sur l’association Impulsion 54. Très bientôt, vous aurez aussi la transcription intégrale de cet épisode. Et moi, je vous dis à bientôt pour un prochain épisode sur l’univers méconnu des chiens guides d’aveugles ou d’assistance.

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