Dans cet épisode, je vous présente je vous présente Marion, qui est instructrice de locomotion à l’école des chiens guides du Nord à Lille. C’est en souhaitant revenir dans son nord natal que Marion, alors éducatrice spécialisée, découvre l’opportunité de devenir instructeur de locomotion au sein de l’école de chiens guides du Nord. Mais quelle formation lui permet de se réorienter ? Et quelle place tient ce métier dans le parcours vers l’obtention d’un chien guide ? De ses premiers pas toute jeune formée à aujourd’hui, Marion revient pour nous sur les principaux moments où elle intervient auprès des personnes déficientes visuelles ayant fait une demande de chien guide. Elle nous explique aussi comment elle travaille au quotidien en lien notamment avec ses collègues éducateurs de chiens guides, afin de faire matcher tout de suite les binômes maîtres et chiens.
Retrouvez ci-dessous une retranscription synthétique avec pleins de photos :
Est-ce que tu peux te présenter rapidement ?
Je m’appelle Marion, j’ai 34 ans, et je suis instructrice de locomotion à l’école des chiens guides du Nord depuis maintenant 5 ans.
Peux-tu nous dire comment tu t’es orientĂ©e vers ce mĂ©tier ?
A l’origine, je suis éducatrice spécialisée depuis 2009 et je travaillais en centre de rééducation sociale en région parisienne. C’est lors de mon retour dans le Nord que j’ai été un peu bloquée professionnellement, et je connaissais les chiens guides via ma grande sœur qui est éducatrice de chiens guides depuis plus de 10 ans, et instructrice de locomotion depuis 7 ans, métier que je ne connaissais pas du tout.
Un poste d’instructeur de locomotion était ouvert à l’école des chiens guides du Nord à Lille, pour lequel j’ai été prise, avant d’être envoyé en formation pour apprendre ce métier à Paris. La formation se déroule pendant 8 mois auprès de la Fédération des Aveugles et des Amblyopes de France, et c’est bien souvent l’employeur qui envoie son salarié en formation.
La formation est accessible aux personnes détentrices de certains diplômes (éducateur spécialisé, infirmier, psychomotricien, ergothérapeute et STAPS). On apprend la locomotion avec les techniques qui vont permettre grâce aux autres sens que la vue, d’appréhender son environnement, de l’analyser, de le comprendre et de le maîtriser. Ce métier peut aussi s’exercer dans des structures pour enfants (IJA), ou en centre de réadaptation pour adultes.
En tant qu’instructrice de locomotion, mon rôle et mon travail au quotidien vont être d’apprendre aux personnes déficientes visuelles qui arrivent à l’école et qui vont vers le projet chien guide, à être autonomes dans leurs déplacements. Le chien guide est en effet un “outil” d’aide au déplacement, mais ce n’est pas lui qui gère. La plupart du temps, on va passer par la canne blanche qui va être le premier outil d’aide de détection, en partant d’apprendre à marcher droit sur un trottoir, se repérer et s’orienter dans l’espace, savoir se positionner à un carrefour et l’analyser pour le traverser en prenant des repères. On utilise souvent une plaque aimantée sur laquelle on schématise l’environnement pour le toucher.
On utilise beaucoup l’ouĂŻe, il y a Ă©normĂ©ment d’informations auditives dans l’environnement, rien que la circulation et le bruit des voitures sont sources d’informations. On travaille aussi sur le podotactile avec les sensations sous les pieds, le sens des masses avec la perception des pleins et des vides, le sens kinesthĂ©sique avec les sensations du corps dans le mouvement, les dĂ©nivelĂ©s au niveau du sol, etc. Tous ces sens vont permettre de comprendre l’environnement, de se crĂ©er la reprĂ©sentation mais aussi de crĂ©er des repères.
A la suite du dépôt de leur dossier pour demander un chien guide d’aveugle, les personnes viennent en stage d’accueil/découverte ce qui leur permet de rencontrer tous les acteurs de l’école (éducateur de chiens guides d’aveugle, psychologue et un instructeur de locomotion). C’est à cette occasion que j’interviens pour un premier bilan afin de détecter leurs difficultés et leurs besoins en termes de déplacement sur un petit parcours en ville. Certaines personnes ont déjà eu des séances de locomotion dans d’autres structures, et ça me permet d’évaluer si on peut les accompagner vers le chien guide, et si c’est toujours leur objectif.
A partir de ce premier bilan, je vais pouvoir débuter mon accompagnement sur des périodes plus ou moins longues selon leurs besoins, d’une journée à quinze jours. On va apprendre les techniques de locomotion dans un lieu inconnu avant de les transposer dans leur lieu de vie pour prendre des repères et comprendre l’environnement.
J’interviens à nouveau peu de temps avant la remise du chien guide, pour travailler la transition entre le déplacement à la canne blanche, et celui avec le chien guide d’aveugle. Les repères et le type de fonctionnement ne sont pas tout à fait pareil, on s’adapte donc. Je peux aussi intervenir sur l’acquisition de nouveaux trajets, en binôme avec les éducateurs.
Dans le cadre de mon métier, je fais aussi un peu d’administratifs en rédigeant les bilans et suivis pour que mes collègues puissent être au courant des avancées, on travaille aussi en équipe avec les éducateurs pour faire matcher les bonnes personnes aux bons chiens. J’ai aussi toute une mission de sensibilisation que j’apprécie auprès d’un public plus médical, mais aussi auprès des communautés de communes pour améliorer l’accessibilité de tous.
Par rapport à mon métier précédent d’éducatrice spécialisée, il y a forcément des aspects dont je me sers aujourd’hui, comme l’écoute, l’empathie mais aussi l’accompagnement de la personne autour de mes missions et objectifs. Je reste éducatrice spécialisée dans l’âme.
D’ailleurs, est-ce qu’il y a quelque chose que tu as appris ou découvert avec les chiens guides ?
Tout simplement j’y ai appris mon métier, et j’ai découvert le monde de la déficience visuelle et du chien guide. Ma sœur travaille ici depuis bien plus longtemps que moi, je connaissais globalement par nos échanges ou les portes ouvertes auxquelles j’ai assisté. Mais je me suis rendue compte de l’aspect technique, de toutes les capacités possibles pour repousser les limites, ça a été une grande découverte dès ma formation d’instructeur en locomotion.
As-tu fait une rencontre exceptionnelle grâce aux chiens guides ?
J’ai pas une personne spécifiquement, mais plutôt des personnes déficientes visuelles avec une force de rebond impressionnante, notamment quand ils ont perdu la vue d’un coup.
Pour finir, quel est ton pire et ton meilleur moment avec les chiens guides ?
Les moments que j’affectionne beaucoup sont les fins de remise, et les remises officielles où la personne peut s’exprimer sur son parcours, et nous aussi on peut dire quelques mots à cette occasion.
Merci beaucoup Ă Marion qui m’a dĂ©voilĂ© en toute simplicitĂ© les dessous de son mĂ©tier des plus mĂ©connus au sein du mouvement chien guide ! Et merci encore Ă l’Ă©quipe de l’école du Nord pour son accueil chaleureux !
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