Dans cet épisode, je vous présente Bérénice qui a 14 ans et est accompagnée depuis quelques mois par Opium, son chien guide de la Fondation Frédéric Gaillanne. Malvoyante de naissance, Bérénice prend conscience dès ses essais à la canne blanche, qu’elle serait plus à l’aise avec un chien guide d’aveugle, surtout face au regard des gens. Elle découvre alors l’existence de la Fondation Frédéric Gaillanne, seule association en France et en Europe à remettre des chiens guides à des moins de 18 ans. Mais comment obtenir un chien guide auprès de la fondation ? Et comment gérer Opium dans son quotidien de lycéenne ? De ses premiers pas à la canne à sa rentrée au lycée, Bérénice nous raconte les différentes étapes qui lui ont permis d’être guidée aujourd’hui par Opium. Elle revient aussi sur l’autonomie que lui apporte son chien guide, mais aussi les éléments à prendre en compte avant de se lancer dans l’aventure en tant qu’adolescente.

Retrouvez la transcription intégrale en fin de page.

Est-ce que tu peux te présenter rapidement ?

Je m’appelle Bérénice, j’ai 14 ans, je suis malvoyante de naissance et je viens de rentrer en seconde au lycée avec mon chien guide Opium, un labrador noir de 2 ans qui a été éduqué par la Fondation Frédéric Gaillanne.

Pour bien comprendre, peux-tu revenir sur ton parcours jusqu’au chien guide ?

Malvoyante de naissance, on a détecté ça à mes 3 ou 4 mois, j’ai environ 1/20ème de vue, mais je ne vois pas les reliefs, ni précisément à un mètre car c’est toujours un peu flou, et tout ça dans une vision tubulaire comme dans un tube ou à travers des jumelles. J’ai longtemps tenu la main de mes parents sans sortir toute seule, puis j’ai voulu marcher toute seule avant d’essayer la canne que je n’ai pas appréciée du tout. Vers 12 ans, je voulais trouver un moyen de sortir seule sans tomber, et de me signaler afin que les autres piétons me laissent la place de passer. La canne ne m’a pas plu car tout le monde me regardait, ce qui me dérangeait, alors qu’avec le chien ce sont des regards d’étonnement et bienveillants.

Ainsi, j’ai appris à me déplacer à la canne au SIAM 92 grâce à des cours de locomotion (comme abordé dans l’épisode 27 avec Marion qui est instructrice de locomotion) dans l’optique de pouvoir être autonome et d’avoir un chien guide. C’est d’ailleurs au SIAM que j’ai croisé une psychologue accompagnée d’un chien guide, et je me suis dit que c’était génial ! Elle m’a indiqué que c’était uniquement pour les adultes, ce qui m’a déçue… Mais quelques mois après le SIAM 92 nous a parlé des chiens guides d’aveugles pour les mineurs avec la Fondation Frédéric Gaillanne, et j’étais vraiment contente !

J’ai envoyé mon dossier médical et de motivation, avec toutes les raisons pour lesquelles je souhaitais avoir un chien guide d’aveugle. S’il est accepté, on fait un stage dit “de découverte” le temps d’un week-end afin d’apprendre à marcher avec un chien et à s’en occuper. Je l’ai fait en janvier 2019, avec des chiens qui ont fini d’être éduqués, mais que la Fondation garde pour les stages et les sensibilisations/démonstrations, et qui retournent en famille d’accueil. J’ai eu Mooz, un Saint-Pierre qui est le croisement entre deux labernois, eux-mêmes issus d’un croisement entre un bouvier bernois et un labrador, une race qui vient de Mira (Canada).

J’ai ensuite fait le stage de pré-classe qui dure une semaine avec hébergement et pendant lequel j’ai testé 2 chiens : News puis Loft, afin de voir encore plus de chiens différents à nouveau parmi les chiens prévus par la Fondation. On va apprendre à marcher en ville, à s’en occuper totalement (jouer avec lui, gérer ses besoins, lui donner à manger, etc.). 

Après un an de décalage du fait de la crise sanitaire, j’ai fait mon stage de remise de trois semaines, appelé « classe » en avril 2021. La première journée j’ai testé 3 des 6 chiens prêts à être remis, et à nouveau plusieurs le lendemain matin, puis la fondation nous attribue le nôtre lors de cette deuxième journée. J’ai pu définir mes envies et mes coups de cœur, même si ce sont les éducateurs qui ont le dernier mot. J’ai encore eu deux semaines et demi avec Opium, pour créer du lien.

Bérénice et les autres jeunes de la classe de remise en avril 2021, chacun avec son chien guide de la Fondation Frédéric Gaillanne

Opium et moi avons été le 100ème binôme créé par la fondation Frédéric Gaillanne, ce qui a été un peu médiatisé notamment en vidéo par Brut, pendant la remise et ma première rentrée au collège avec Opium. D’ailleurs j’étais très stressée pour cette rentrée, notamment pour la cantine.

Dans un précédent épisode, Capucine et sa maman Géraldine nous racontaient au contraire que Many, son chien d’éveil Handi’Chien n’accompagnait pas Capucine à l’école, pour ne pas la perturber. Du côté de Naya, la chienne d’assistance Acadia de Romain, jeune diabétique, il nous confiait espérer pouvoir l’emmener bientôt au collège.

Depuis l’arrivée d’Opium, le plus gros changement est de pouvoir sortir, seule ou avec des amies ! Avant je stressais de tomber, même d’une petite marche…

D’ailleurs, est-ce qu’il y a quelque chose que tu as appris ou découvert avec les chiens guides ?

J’ai découvert à quel point les familles d’accueil étaient impliquées dans l’éducation du chien guide ! Je pensais que ces familles gardaient juste le chien chez elles, je ne savais pas qu’elles les socialisaient autant. D’ailleurs Nadia, la famille d’accueil d’Opium, l’a vraiment bien socialisé car il n’a peur de rien.

Est-ce qu’il y a des avantages et des inconvénients à faire cette demande de chien guide d’aveugle très jeune ?

L’avantage est surtout qu’on devient autonome très jeune, et le fait de s’occuper d’un autre être vivant et d’en être responsable nous rend plus mâture. Il faut par contre vraiment être autonome, pas forcément dans les déplacements, mais aussi dans  la vie quotidienne (savoir s’habiller, se laver, s’occuper de soi), car on est seul pendant les stages.

Est-ce que dans ces quelques mois tu as été bluffé par Opium ?

Sa famille d’accueil m’avait dit lors de la remise qu’il avait peur des escalators, alors j’ai tenté de voir sa réaction dès notre retour à Paris et il a géré en se donnant à fond.

As-tu fait une rencontre exceptionnelle grâce aux chiens guides ?

Je me suis fait plusieurs amies dont Manon pendant mes stages à la fondation, mais aussi Marine qui a Odor, un saint-pierre aussi de la fondation, que je n’ai jamais rencontré en vrai mais avec qui je discute beaucoup.

Pour finir, quel est ton pire et ton meilleur moment avec les chiens guides ?

Le meilleur moment c’est soit la remise d’Opium, soit quand je suis arrivée avec lui chez moi la première fois, je n’y croyais pas !

Le pire moment a été lorsqu’on a perdu de vue Opium au bois de Boulogne lors de notre premier week-end. On était sur une pelouse et en un instant on ne savait plus où il était alors qu’il y avait une voie rapide à côté ! J’ai cru que j’allais tomber dans les pommes, et il est revenu finalement assez vite, et n’était pas du tout du côté de la route.

Comme nous en a parlé Bérénice, voici le lien vers sa chaîne YouTube “Bérébigleuse” où elle partage ses astuces et adaptation pour suivre en cours, ou comment elle voit dans le noir, etc.

Merci beaucoup à Bérénice pour sa persévérance dans nos péripéties d’enregistrement et son temps en pleine rentrée au lycée ! Au plaisir de faire une belle détente ensemble !

Transcription intégrale

E.

Bonjour et bienvenue sur le podcast futur Chien guide, le premier podcast sur l’univers des chiens guides d’aveugles. Je suis Estelle, sa créatrice et également famille relais bénévole pour l’École de Chiens guides de Paris depuis plus de 4 ans. Je vous donne rendez-vous chaque premier et troisième vendredi du mois pour partager avec vous mes rencontres avec des familles d’accueil, des maîtres chiens guides, mais aussi plein d’autres invités engagés auprès des chiens guides d’aveugles. Dans cet épisode, je vous présente Bérénice, qui a 14 ans et est accompagnée depuis quelques mois par Opium, son Chien guide de la Fondation Frédéric Gaillanne.

E.

Malvoyante de naissance, Bérénice prend conscience, dès ses essais à la canne blanche, qu’elle serait plus à l’aise avec un chien guide d’aveugles, surtout face au regard des gens. Elle découvre alors l’existence de la Fondation Frédéric Gaillanne, seule association en France et en Europe à remettre des chiens guides à des moins de 18 ans. Mais comment obtenir un chien guide auprès de la Fondation ? Et comment gérer Opium dans son quotidien de lycéenne ?

E.

De ses premiers pas à la canne, à sa rentrée au lycée, Bérénice nous raconte les différentes étapes qui lui ont permis d’être guidée aujourd’hui par Opium. Elle revient aussi sur l’autonomie que lui apporte son chien guide, mais aussi les éléments importants à prendre en compte avant de se lancer dans l’aventure en tant qu’adolescente. Après quelques difficultés à enregistrer, la qualité du son n’est pas au rendez-vous cette fois ci. J’espère cependant que l’aventure de Bérénice vous fera oublier ce détail. Et maintenant, place à l’épisode.

E.

Bonjour Bérénice.

B.

Bonjour Estelle.

E.

Merci de m’accorder un nouveau temps avec toi puisqu’on a eu quelques difficultés à se trouver connectées, enregistrer, désenregistrer, etc. Donc je suis hyper ravie que tu m’accorde encore une petite heure ensemble. Est-ce que pour commencer, tu peux te présenter ?

B.

Oui, donc, moi, je m’appelle Bérénice, j’ai 14 ans et je suis malvoyante de naissance. Je suis en seconde, du coup, et j’ai un chien guide, Opium. C’est un labrador noir que j’ai eu à la Fondation Frédéric Gaillanne il y a environ 4 mois.

E.

OK, alors, est-ce que, pour nous, tu peux revenir un peu sur cette aventure et nous expliquer comment tu es arrivée à avoir Opium ? Est ce que du coup, toi, tu es déficiente visuel depuis longtemps?

B.

Moi, je suis malvoyante de naissance. Donc on a détecté ça environ à mes 3/4 mois.

E.

Donc ça a été détecté assez tôt. Et comment s’est passée un peu ton enfance dans tes souvenirs ? Alors, pas à partir de 3 ou 4 mois. Mais comment ça s’est passé en grandissant ? Comment tu l’as vécu ? Est ce que tu voyais déjà très, très peu ? Quelle est ta vision ?

B.

J’ai environ un vingtième de vue. Donc c’est assez scientifique quand même, mais je ne vois pas les reliefs, je ne vois pas vraiment précisément à un mètre, ni même avant d’un mètre je vois pas précisément. Et sinon, je vois un peu flou, parfois, c’est très compliqué. Et j’ai une vision tubulaire, donc c’est à dire que je ne vois pas en haut, en bas et sur les côtés. En gros, je vois un peu comme dans un tube, quoi.

E.

Comme si tu avais un tube devant et pas de vision périphérique quoi.

B.

Comme dans des jumelles.

E.

Comme dans des jumelles. Et donc, ça, c’est le cas depuis que tu es toute petite ?

B.

Ouais.

E.

Et tu t’es adaptée, j’imagine, en grandissant ? Comment ça s’est passé dans ton enfance ?

B.

On va dire que quand j’étais petite, je tenais la main des parents et je ne sortais jamais toute seule. Ce qui est un peu normal, mais j’étais un peu plus collée que les autres à mes parents. En grandissant, j’ai voulu essayer de marcher toute seule avec quelques chutes, mais sinon ça a été. Et après, j’ai essayé la canne, mais j’ai pas aimé du tout. Donc c’est là que j’ai essayé de trouver une autre alternative et qu’on a trouvé le Chien guide du coup.

E.

T’as essayé la canne à partir de quel âge, du coup ?

B.

Je dirais 12 ans. C’est assez tard quand même. Je voulais trouver un moyen de sortir toute seule sans tomber et de me faire repérer aussi par les autres. Pour qu’ils fassent plus attention et qu’ils me laissent un peu le chemin. La canne, ça ne m’a pas plu parce que, premièrement, tout le monde te regarde. Dans mon cas, ça me dérange un peu. Alors qu’avec le chien c’est plus des regards d’étonnement plus que la canne, je trouve. Plus des regards bienveillants. Enfin, dans mon cas, je dirais.

E.

Et du coup, tu n’as pas du tout employé la canne ?

B.

En fait, j’ai juste employé la canne pour la travailler un peu. Parce qu’en fait,  quand on a un chien, il faut avoir un plan B si le chien est malade. Du coup, j’ai travaillé la canne au cas où si Opium tombe malade ou s’il ne peut pas travailler avec moi pour dépanner pendant un ou deux jours.

E.

Donc, tu as quand même pris un petit peu la canne et je pense que tu as pris des cours de locomotion aussi ? On en parlait juste l’épisode d’avant avec Marion qui est instructrice en locomotion. En effet, parce que que ce soit la canne ou le chien guide, il y a, un peu comme elle nous disait, le code de la route du déplacement à avoir. Je ne sais pas si toi, du coup, tu as pris des cours de locomotion dans la structure qui accompagnait ? Je crois qu’on en avait parlé…

B.

Oui j’en ai pris au SIAM dès mon plus jeune âge vers… Je dirais 8/9 ans, j’ai commencé assez tôt quand même.

E.

 Le Siam, tu peux nous rappeler ce que c’est ?

B.

Le SIAM, c’est une association qui encadre des jeunes déficients visuels. Qui les accompagne dans leur vie scolaire et dans leur quotidien en leur donnant plein d’astuces et en essayant d’adapter au maximum les supports à l’école. Et de sensibiliser les professeurs et de donner des astuces pour le quotidien. Par exemple : faire à manger quand on voit pas ou traverser sans voir les feux, des choses comme ça.

E.

Ce qu’on appelle l’adaptation à la vie journalière, c’est ça ?

B.

Oui.

E.

C’est tout ce qui encadre… du coup. Y compris avec le déplacement, mais des fois, il y a des instructeurs en locomotion dont c’est le métier tout particulièrement. Du coup, toi, tu a appris tout ça, ce qui a permis de continuer l’école. Le même cursus scolaire que tes amis, j’imagine?

B.

Oui, j’ai fait un an à l’INDJA, donc l’Institut national des jeunes aveugles à Paris. Ça ne m’a pas plu parce que je trouvais qu’ils encadraient trop les jeunes. Donc, suis retourné au bout de 6/7 mois dans le euh..

E.

Oui dans l’enseignement classique ?

B.

Oui voilà, c’est ça.

E.

Et ça n’a pas été trop dur pour toi, du coup ? Ce retour dans le collège classique vis-à-vis de l’environnement protecteur de l’INDJA.

B.

Ben non, parce que les profs dans le collège classique étaient vraiment très… Enfin, ils m’entouraient vraiment énormément parce que je suis arrivée en milieu d’année, donc j’étais complètement perdue. Je n’ai pas eu de prérentrée ni rien pour visiter le collège. Tous les élèves de ma classe étaient prévenus et sensibilisés, donc j’ai été vraiment bien accueillie.

E.

Oui donc ton retour, finalement, était mieux que ton départ à l’INDJA de ta propre perception. Ça peut être différent selon les personnes, bien sûr.

B.

 Il y a beaucoup de jeunes qui adorent l’INDJA et qui y restent.

E.

Oui, c’est fait pour ça aussi.

B.

Oui.

E.

Mais en effet, toi, ça ne t’as pas tout à fait convenu. Et c’est en sortant de l’INDJA que tu as du coup réfléchi à aussi te déplacer autrement. Et c’est là-bas que tu avais appris, un peu, l’existence du Chien guide. Comment ça s’est passé ?

B.

Oui, en fait la première fois que j’ai vu un Chien guide, je me rappelle, on avait des cours d’orthoptie (c’est pour travailler la vision). On devait monter à l’étage, un étage au dessus de notre salle de classe. Et il y avait une dame, je crois que c’était une psychologue ou un truc comme ça. Et elle avait Chien guide et je l’avais vu dans le couloir et je me suis dit  » Mais c’est génial ce truc ! ».  Ha ! Ha ! Je lui ai posé plein de questions et tout. Et elle m’a dit que c’était pour les majeurs, du coup, j’étais un peu déçue. Et 2/3 mois après, le SIAM nous a parlé des chiens guides pour les mineurs. Du coup, j’étais assez contente.

E.

Alors quand le SIAM t’a parlé de tout ça, il t’a parlé d’une structure unique en France qui s’appelle la Fondation Frédéric Gaillanne, dont on va un peu parler. D’où vient ton bel Opium et qui remet donc des chiens à des personnes, des enfants, enfin des adolescents – je vais peut-être plutôt dire – puisque vous devez avoir entre 12 et 18 ans, il me semble, pour recevoir un chien. Alors c’est le même principe que dans les autres écoles de Chiens guides : le chien vous est confié gratuitement et il y a quelques sensibilisations et quelques cours, on va dire, que toi, tu as dû faire. Comment ça s’est fait ton approche avec la Fondation Frédéric Gaillanne ? Qui n’est pas forcément tout à fait proche de chez toi puisqu’on est toutes les deux en région parisienne – il me semble dans le 92 – alors que la Fondation, elle, est plutôt dans le sud de la France.

B.

Premièrement, il faut remplir un dossier médical et un dossier de motivation pour donner toutes les raisons pour lesquelles on aimerait avoir un Chien guide. Il faut l’approbation de tous nos médecins, donc : orthoptiste, pédiatres ou médecins généralistes. Après, on envoie notre dossier et la fondation nous répond soit positivement, soit négativement. Et elle planifie un premier stage de deux jours. Donc, c’est le week end de découverte. On va apprendre à marcher à côté d’un chien, à s’en occuper. C’est les premiers soins qu’on va donner un chien et apprendre à cohabiter avec un chien.

E.

Et toi, c’était quand pour toi, ce stage de découverte ?

B.

Le 18 janvier, je crois.. 2019 ou 2018 je ne sais plus.

E.

Et donc ça, c’est la première fois que t’as mis les pieds à l’association ?

B.

Oui.

E.

Et tu avais, donc pour ce stage de découverte…C’est un stage qui se passe pas du tout avec, enfin, c’était pas du tout avec Opium ?

B.

Non.

E.

C’est des chiens, du coup, qui sont spécifiques ou qui sont en cours d’éducation ?

B.

C’est des chiens que la Fondation a fini d’éduquer, mais qui n’ont pas été remis parce que la Fondation estimait qu’ils voulaient les garder pour tous les stages. Donc, c’est des chiens qui retournent en famille d’accueil quand il n’y a pas de stage ou de démonstrations, de portes ouvertes, ou des choses comme ça… Quand il y a des stages, lui viennent à la fondation et ils passent soit 2 jours, soit une semaine pour accompagner les jeunes.

E.

Tu te souviens un peu de ton premier contact, justement avec le chien dans le cadre de ton stage de découverte ?

B.

Oui, j’ai eu Mouse, je me rappelle, c’est un Saint-Pierre.

E.

Est ce que tu peux nous expliquer ce qu’est un Saint-Pierre ?

B.

Oui. Un Saint-Pierre c’est un croisé entre un labrador et un bouvier bernois, ce qui donne un l’abernois. Et après c’est un croisé entre deux l’Abernois. C’est une race venue du Canada spécifique pour les Chiens guides.

E.

Parce que, du coup, on parle du Canada, pour ceux qui connaissent un peu ce qui se passe au Canada, on parle de la Fondation Mira au niveau du Canada. Et en fait, la Fondation Frédéric Gaillanne est une entité, ou du moins le prolongement – qui s’appelait avant, d’ailleurs, Mira France, je crois ou même Mira Europe – on en parlait l’autre jour. C’est maintenant la Fondation Frédéric Gaillanne, mais c’est très lié à l’enseignement et l’apprentissage qui a été fait. Toute l’expérience qu’a la Fondation Mira au Canada, et notamment ces magnifiques St-Pierre ! Qui sont du coup très majestueux, noirs et avec un liseré blanc sur le poitrail et le museau, c’est ça ?

B.

Oui.

E.

Donc, tu as rencontré Mouse ?

B.

Oui.

E.

Comment ça s’est passé pour toi?

B.

Je la trouvais un peu molle. Mais en plus, plus on fait des stages et plus on définit un peu nos envies de notre futur chien guide. Par exemple, je savais à travers le stage que j’avais fait avec Mouse, que je ne voulais pas un chien mou. Donc du coup, ça écartait tous les chiens mous, on va dire, des idées des éducateurs. Avant même qu’on vienne au stage de remise, ils savent à peu près quels chiens ils vont donner.

E.

Sachant que tu fais ton stage de découverte de deux jours que tu as fait en janvier 2019, on a dit… Euh 2018 peut-être ! Parce qu’il y a un stage intermédiaire avant la remise, mais qu’on appelle une pré-classe, c’est ça ? Qu’est-ce qu’il se passe ?

B.

Oui. On fait une classe d’une semaine. On va changer deux fois de chien, pour tester encore plus de chiens. Donc on va apprendre à plus marcher en ville et on va aller en ville concrète avec des passants, des voitures, des carrefours. On va apprendre à s’en occuper totalement. C’est-à-dire, jouer avec lui,lui faire faire ses besoins, lui donner à manger. En fait, on va vraiment faire comme si c’était notre chien et s’en occuper 24h/24.

E.

Sauf que là, c’est à nouveau, du coup, les chiens prévus pour le stage. Donc, ces chiens dont tu nous a parlé et qui restent dans les familles d’accueil et qui sont à disposition, qui sont au bout de leur éducation, mais qui sont là pour les sensibilisations et les démonstrations… et donc, vos classes.  Et là, t’avais eu qui en pré-classe ?

B.

J’avais eu News que j’avais adoré parce qu’elle était vraiment hyperactiv et elle guidait assez bien. Et j’avais eu Loft qui guidait très bien, mais il était un peu un peu mou.

E.

Encore un petit mou. Ha ! Ha ! Ha ! Ok, et donc là, tu as pu découvrir encore plus et apprendre un peu comment être en binôme avec un chien guide dans la vie de tous les jours, c’est ça ?

B.

Oui.

E.

Et vous êtes accueillis, je crois, directement sur le site de la Fondation Frédéric Gaillanne. Puisqu’on a dit que tu étais assez loin et c’est le cas de beaucoup de jeunes qui viennent faire ces stages découverte/ces pré-classe. Du coup, vous êtes tous logés sur place ?

B.

Oui, il y a une dizaine de chambres sur place avec un salon, une cuisine et des douches. Et des toilettes.

E.

Bien sûr. Donc, vous êtes une dizaine pendant que, ce soit le stage de découverte pour la pré-classe?

B.

Pour la découverte, nous, on était trois.

E.

D’accord.

B.

Pour la pré-classe, on était 5… Non, on était 4, pardon. Et pour le stage de remise, pour la ‘classe’ du coup, on était 5.

E.

Et comment tu t’es senti, toi, entre les différents stages ? Du coup, tu continuais à aller au collège en parallèle ?

B.

Oui, les stages se déroulent le week end pour le stage de découverte. Pour la pré-classe c’est pendant les vacances.

E.

Bien sûr.

B.

Et la classe… Avant, il le faisait en juin/juillet et maintenant ils l’ont décalé en avril parce que comme c’est dans le Sud, il fait vraiment très, très chaud. Donc c’est pas agréable pour marcher en ville avec un chien. Donc maintenant c’est en avril pendant deux semaines de vacances et ça déborde une semaine sur les cours.

E.

Et donc cette classe tant attendue, ce stage de remise : il s’est passé comment pour toi ? C’était quand ?

B.

C’était en avril dernier, du coup.

E.

Il me semble que le Covid est passé par là et du coup, ça a un peu retardé ton projet, c’est ça ?

B.

Oui d’un an.

E.

Ah oui, carrément !

B.

Oui…

E.

Donc, ça devait être en avril 2020. Et puis, en avril 2020, on sait tous où chacun était puisqu’on était chez soi en général.

B.

Enfin, je ne sais pas si ça aurait dû être en avril 2020. Enfin, je sais que mon stage de découverte a été retardé parce qu’à la base il devait être en novembre, mais il a été retardé du 11 janvier au 18 janvier, du coup. Et ma pré-classe, je crois aussi qu’elle a été retardée.

E.

Donc, t’as fait tout ça un petit peu en décalé. Mais tu es arrivée en avril dernier à enfin faire ce stage de remise. Et là, donc, Opium n’était pas confié tout à fait tout de suite. C’est ça ?

B.

Oui, il y a deux jours. Donc, on arrive le lundi et toute la journée, on va tester. Non, on arrive le dimanche pardon… Toute la journée, on va tester les chiens, du coup, le lundi. Il y en avait 5… Non 6 du coup ! On en a testé 3 environ, je crois, le lundi et on en re-teste le mardi. Et le mardi après-midi, ils nous remettent notre chien.

E.

Donc là, on ne parle plus des chiens qui sont éduqués spécifiquement pour les stages. On parle bien des chiens qui sont éduqués pour vous être remis.

B.

Oui.

E.

Là, les 6 chiens dont tu nous parles… Vous étiez 6 bénéficiaires en face du coup ?

B.

Non, on était 5, mais il y en a toujours un de plus , je crois.

E.

Ok, pour laisser un petit peu de marge, selon vos relations, quoi ?

B.

Oui.

E.

Et toi alors, ces deux premiers jours de stage/de remise, comment ça s’est passé?

B.

J’ai pu, un peu, définir les envies que j’avais, du coup. Je les aimais tous, les chiens, ils étaient vraiment tous adorables et ils guidaient tous super bien. Mais j’avais quelques petits coups de cœur, quand même. J’avais Otop, donc c’est un St-Pierre, du coup. Et j’avais Opium.

E.

Opium qui n’est pas un Saint-Pierre.

B.

C’est un labrador noir.

E.

Un labrador noir… Mais alors, tu as donné, un peu, ton avis aux éducateurs. Il me semble que c’est comme ça que ça se passe.

B.

Oui.

E.

Mais c’est eux qui décident, hein ?

B.

Ils ont le dernier mot, enfin ils tranchent quoi.

E.

Alors, qu’est ce qu’ils ont tranché ?

B.

Moi, ils m’ont donné Opium.

E.

Mais du coup, tous les autres jeunes ont réussi à avoir un petit peu leur choix numéro un ?

B.

Non, parce qu’il y avait un énorme coup de coeur sur Otop. On était 3, je crois, à vouloir Otop, sur 4 ! Parce que, du coup, il y a une jeune d’entre nous (dans les 5) qui a une remise un peu particulière, parce qu’elle a eu son chien guide avant.

E.

D’accord.

B.

Donc, on était vraiment 4 à ne pas savoir notre chien guide avant d’arriver. Et on était 3 sur Otop.

E.

Donc toi, finalement : Opium, t’a été confié. Et je crois savoir que, pour la Fondation Frédéric Gaillanne, c’est un petit peu un événement cette remise puisque tu es la 100ème. Le 100ème binôme avec Opium à être créé par la Fondation Frédéric Gaillanne depuis sa création.

B.

Oui.

E.

Donc, tu as été un petit peu médiatisé. Je t’ai vu dans différentes vidéos. Est-ce que tu peux nous raconter comment ça s’est passé ? Ces petites vidéos qui ont été faites – en dehors de tes vidéos dont on parlera plus tard que tu fais personnellement. Je crois que c’est Brut qui est venu vous voir.

B.

Oui, Brut, c’est… La journaliste, du coup, est venue de dimanche à mardi pour filmer toute la remise. Et elle est revenue le 3 mai, je crois, pour ma rentrée des classes. Enfin ma ‘fausse’ rentrée, mais la rentrée avec Opium au collège.

E.

D’accord, ok. Parce que, tu as fait ces deux premiers jours. Au bout des deux jours de remise, on t’a dit que c’était opium. Mais là, on ne te lâche pas dans la nature, tout de suite, avec Opium ?

B.

Oui, on a encore trois semaines, du coup. Enfin deux semaines et demi de travail avec notre chien. On va vraiment aller en ville, on va apprendre des trajets et les faire en autonomie. On va s’en occuper du coup vraiment 24h/24 et on va beaucoup aussi prendre le temps de créer du lien avec notre chien.

E.

Donc du lien dans le jeu, dans les câlins, dans les moments un peu en dehors du guidage, c’est tout ça ?

B.

Oui.

E.

Et comment s’est passé le début avec Opium ? Comment tu as ressenti tout ça ?

B.

En fait, l’éducatrice des chiens guides, du coup, Céline m’a dit que – enfin nous a dit que – les labradors étaient un peu difficiles… que c’était un peu difficile de créer du lien avec eux, mais qu’une une  qu’on en avait, c’était indestructible. Donc au début, Opium était assez ‘distant’, on va dire. Ça a pris bien, quand même, deux semaines pour que le lien soit assez fort. Au début, il me faisait des câlins, mais c’était pas… Enfin, je veux dire, entre le début de la classe et maintenant, c’est incomparable. Le lien, maintenant, il est indestructible.

E.

Tu sens la différence ?

B.

Oui, totalement.

E.

Et à la fin de ce stage de remise, tu nous parlais  de ta rentrée. Alors, c’est pas la rentrée scolaire de l’année, mais ton premier retour après des vacances, en tout cas, avec Opium au collège. Comment ça s’est passé : est-ce que du côté du collège, tout le monde était sensibilisé ? Vous aviez préparé un peu le terrain ?

B.

Oui, l’école avait mis des affiches, du coup, dans tout le collège. Donc tout le monde avait vu. Et ils avaient vu aussi les vidéos Brut, donc, tout le monde était au courant.

E.

Et comment tu as ressenti, toi, à ta première rentrée avec lui?

B.

J’étais vraiment très stressée. Je pense que ça peut se voir sur les vidéos Brut, d’ailleurs. Mais non, ça s’est hyper bien passé et comme on était en demi-jauge, ça m’a permis de m’adapter avec Opium : de rester le matin à la maison ou l’après midi, du coup. Et de ne pas avoir, tout de suite, la cantine à gérer parce que c’est assez compliqué de gérer la cantine. Parce qu’il faut en même temps  manger, avoir le temps de sortir, avoir le temps de parler avec ses amis… Donc c’est assez speed ! Du coup, je n’ai pas directement eu la cantine, donc ça m’a permis de m’adapter vraiment tranquillement.

E.

Donc ça, c’était du fait des rythmes ‘Covid’, on va dire, ces demi-journées là. C’était pas du tout vis-à-vis de l’adaptation d’Opium, mais au final, c’est plutôt bien tombé pour vous.

B.

Oui.

E.

Comment, justement, tu gères la cantine si on essaye de se projeter avec toi en tant que collégienne ? Tu arrives à la cantine : que fait Opium à tes côtés?

B.

Du coup, je prends mon plateau. Ça a été assez compliqué de prendre cette organisation quand même… Parce qu’en fait, la cantine c’est assez speed ! Donc je prends mon plateau, je vais sur l’espèce de ‘barrière’ là (où on fait défiler nos plateaux), et du coup, une amie me dit ce qu’il y a et elle me met en plateau ce que je veux. Et après, on va à table. Je déjeune, du coup. On débarrasse…

E.

Et tu fais tout ça avec Opium, du coup, à tes côtés ?

B.

Oui, je le prend en laisse avec moi. Parfois, il me tire un peu pour essayer d’aller manger les choses par terre. Ha ! J’ai pas encore fait tombé mon plateau, mais je pense que ça va arriver bientôt… Et ensuite, on remonte et je vais le sortir.

E.

D’accord, donc ça lui permet d’avoir un moment de détente au milieu de la journée.

B.

Oui.

E.

En termes de gestion des besoins… Parce que c’est vrai que c’est quelque chose d’avoir le chien au collège qui est assez particulier pour toi, j’imagine, pour tes autres camarades de classe aussi. Et c’est quelque chose dont on avait parlé, justement, cet été lors de mes hors-séries. Avec Capucine et son Wonder Many -comme on l’appelle dans l’épisode 21 – où elle me disait, sa maman, que ce n’était pas encore possible pour Capucine d’emmener le chien à l’école. Parce que ça la déstabiliserait trop, par rapport aux autres troubles qu’elle a, par rapport à la présence de ce chien d’éveil. Et c’est un peu la même chose pour d’autres raisons du côté de Romain et Naya de l’épisode 23. Donc, Romain est accompagné de Naya, qui est sa chienne d’assistance et qui lui détecte ses crises diabétique (donc hypo et hyperglycémie). Et là, sa maman et Romain, nous disaient – alors Romain, espère bien pouvoir rentrer avec Naya très bientôt au collège – mais que c’était un peu plus compliqué parce qu’il fallait justement qu’il puisse se gérer sa chienne toute la journée. Et donc, comme tu le dis, prévoir des moments de détente et des moments de sortie. Ça n’a pas été compliqué pour toi de t’adapter, pour pouvoir faire tout simplement les besoins d’Opium très proche du collège ?

B.

Ça a été vraiment compliqué parce que moi, du coup, je ne vois pas de loin. Et le problème, en fait, c’est que si je sors sans mes amis, dans la cours, je ne peux pas les retrouver. Donc, il fallait que je trouve un moment pour pouvoir aller lui faire les besoins où je n’ai pas besoin de les retrouver après. Parfois, elles m’accompagnent, mais parfois aussi, c’est assez speed donc elles n’ont pas le temps de m’accompagner. Parce que, par exemple, imaginons qu’il nous reste 10 minutes et elles n’ont pas fini de manger… du coup, je dois remonter vite pour sortir Opium. Je le sors à la récré, du coup, de 10 heures. Après, je le sors à la pause déjeuner et je le ressort, du coup, en sortant du collège.

E.

Donc, en fait, tu t’es organisée quand même pour avoir Opium à tes côtés. Et on ne parle pas forcément des cours, parce qu’Opium, pendant les cours… Si c’est la même chose que ce que font mes élèves chiens guides quand je les ai à côté de moi : ils dorment, en fait, on est d’accord ?!

B.

Mais totalement !

E.

Il ronfle un peu ?

B.

Oui, oui, énormément même !

E.

doncHa ! Ha !  Oui, je sais que parfois, quand je suis en visio ou autre, je les caresse pour les réveiller, un tout petit peu du sommeil profond. Ça leur évite de japper, mais je pense qu’avec Opium, tu fais un peu la même chose.

B.

Non, je le laisse tranquille parce que je trouve que c’est bien d’interrompre les profs quand leur cours est ennuyant.

E.

Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! C’est une autre vision des choses, en effet ! Mais du coup, c’est pas la même responsabilité entre toi et moi, donc c’est tout à fait normal. Et du coup, parmi tout ça. Donc là, tu as fait ta rentrée il y a quelques jours ?

B.

Oui.

E.

Il me semble que tu es rentrée dans un niveau encore au-dessus, puisque tu es rentré au lycée. Même si, il me semble savoir que c’est le même établissement. C’est ça ?

B.

Oui, c’est juste un bâtiment différent.

E.

Et comment s’est passée cette nouvelle rentrée avec des nouveaux camarades de classe ? Peut être des gens qui ne connaissaient Opium.

B.

En fait, il y a 43 nouveaux, donc il y a beaucoup de gens qui ne connaissent pas Opium. Mais dans ma classe je ne connais presque personne, du coup, à part une amie avec qui je suis. Mais pour le moment, ils ne posent pas trop de questions ; ça m’a assez étonnée.

E.

D’accord.

B.

Personne ne pose de questions et personne ne va le voir, donc… c’est un peu bizarre quand même ! Mais c’est une bonne nouvelle parce que, du coup, je n’ai pas à le protéger tout le temps des gens qui veulent le caresser, ou des choses comme ça.

E.

Hum ! Parce qu’on le rappelle, comme je le dis sur mes élèves chiens guides – ça vaut aussi pour Opium et pour tous les autres chiens guides – il faut éviter de les distraire, de les caresser, etc. Parce qu’ils ont une mission ! Quand il est à tes côtés, Opium est là, pour te guider. Et puis bien sûr, quand il court là, c’est encore autre chose. Quand il est en détente, il a quand même ses moments de folie, j’imagine.

B.

Oui énormément de folie. He !

E.

He ! He ! Tu lâches un peu au collège/lycée ou pas du tout ?

B.

Non, pas du tout.

E.

Donc, tu fais ça dans le bois de Boulogne, je crois savoir, à proximité de chez toi. Et là, c’est la grande détente, la liberté.

B.

Ce qu’il préfère, c’est le parc à chiens. Parce qu’il y a plein de copains, donc ça il adore !

E.

En tout cas, on voit comment Opium est arrivé. Est-ce qu’il y a des choses, justement, que tu ne pouvais pas faire avant et que tu fais maintenant avec Opium ?

B.

Le plus gros changement, vraiment, c’est sortir avec des amis. Parce qu’avant, je… Enfin même pas qu’avec des amis, sortir même toute seule ! Parce qu’avant je stressais vraiment de tomber ou qu’il y ait une petite marche (ou un truc comme ça) qui me fasse tomber. Et maintenant, avec Opium, c’est beaucoup plus fluide et beaucoup plus détendu les déplacements.

E.

Donc il t’as permis d’avoir un rythme tout à fait classique de lycéenne/collégienne, on va dire. Et je me demandais si, par contre, il y avait quelque chose que tu avais appris ou découvert en faisant un peu cette démarche pour avoir un chien guide ? Quelque chose auquel tu ne t’attendais pas vraiment en envoyant ton dossier.

B.

J’ai vraiment appris à quel point les familles d’accueil étaient impliquées dans l’éducation des chiens. Je pensais, au début, que c’était un peu comme des familles qui gardaient juste les chiens chez elles. Enfin qu’elles lui donnaient quelques règles quand même, mais je ne pensais pas que le sociabilisait autant. Donc, j’ai vraiment appris ça.

E.

C’est vrai que quand on est famille d’accueil ou famille d’accueil relais comme je le suis, on n’est pas juste là pour avoir un chien. On a aussi une petite mission – en dehors de la mission de sensibilisation du grand public- la mission d’éducation du chien. Et c’est vrai qu’on n’est pas juste là pour garder, le ‘babysitter’, j’ai envie de dire. Mais on a pas mal de choses à leur apprendre. Tu as rencontré d’ailleurs la famille d’accueil d’Opium ?

B.

Oui, d’ailleurs elle est adorable, c’est Nadia. Et elle l’a vraiment hyper bien éduqué parce que il n’a peur de rien.

E.

Et tu l’as rencontré à l’occasion de la remise, c’est ça ?

B.

Je l’ai rencontré, je crois, 2/3 jours avant de retourner chez moi avec Opium.

E.

Tu as pu en apprendre plus sur la jeunesse qu’a passé Opium, auprès d’elle ?

B.

D’ailleurs, elle nous a montré des photos. On aurait dit une peluche, quand il était petit !

E.

Ha ! Ha ! Ha ! Elle t’as, du coup, envoyé quelques photos que tu peux aussi avoir aujourd’hui avec toi ?

B.

Oui.

E.

Oui, c’est chouette ! Et en effet, moi j’en parle beaucoup des familles d’accueil – je crois qu’il y a la moitié de mes épisodes sur mon podcast futurchienguide qui sont sur les familles d’accueil – parce que c’est un maillon indispensable, toujours en lien avec les écoles de Chiens guides. Sans les écoles, elles ne feraient pas grand chose non plus, mais sans les familles, les écoles ne feraient pas grand chose, non plus, faut le dire. Et je me demandais, parmi tout ça, est-ce qu’il y a quelque chose que tu referais différemment depuis le mois d’avril ? Même si ça fait quelques mois que Opium est avec toi. Ou alors la demande, par exemple, l’envoi du dossier, tu l’aurais peut être fait plus tôt ? Si c’était à refaire, comment tu ferais différemment ?

B.

Je pense que je gèrerais autrement la cantine avec Opium. Parce que je la ??? Au début. Je pense que je prendrais plus le temps de créer du lien et de jouer, que je l’ai fait au début. Parce qu’au début, je voulez vraiment que tout soit parfait, qu’il travaille avec beaucoup le trajet pour aller au collège. Et je n’ai pas pris le temps de me poser et de créer beaucoup de liens avec lui. Parce que ça, ça fait 2 semaines après mon arrivée, quoi. Mais je pense que j’aurais dû le faire dès le début !

E.

Et par rapport à la Fondation Frédéric Gaillanne, on a bien vu comment ça s’organiser entre les 3 stages. Donc, on a le stage de découverte, la pré-classe et le stage de remise (qu’on appelle aussi la classe, du coup). Est ce que par rapport à tout ça, tu as vu des inconvénients ou des avantages à faire ta demande, toi, en tant que mineur ? Et est-ce qu’il y a des éléments à prendre en compte avant de se lancer dans l’aventure et d’envoyer son dossier à la Fondation ?

B.

L’avantage à faire cette demande, c’est que vraiment on est responsabilisés très jeunes et que l’on s’occupe d’un autre être-vivant que nous. Et ça nous apprend à être plus matures, plus rapidement. Mais en fait, pour demander un chien guide, il faut vraiment être autonome. Enfin, pas ‘autonome : savoir sortir tout seul ou quoi’. Mais savoir, par exemple, s’occuper de soi, savoir s’habiller, savoir faire au moins un trajet tout seul chaque jour.

E.

Ouais.

B.

Oui puis encore plein d’autres critères, mais je ne les connais pas tous. Mais ils sont sur le site de la Fondation.

E.

On remettra le lien vers le site de la Fondation. Mais ce que tu dis, c’est qu’il ne faut pas être dépendant dans les gestes du quotidien, principalement.

B.

Oui, voilà c’est ça !

E.

Ok. Parce que d’ailleurs, quand tu es en stage de pré-classe ou quand tu es en classe de remise, il n’y a pas d’aide pour votre quotidien : pour vous habiller, pour vous laver, etc.

B.

Non.

E.

Donc, c’est bien un préalable à prendre en compte avant de se lancer dans l’aventure. Par rapport à tout ça, est-ce qu’il y a un moment où dans ces derniers mois, tu as été bluffée par Opium ? Un moment où tu ne t’attendais pas du tout à ce qu’il fasse ce qu’il a fait ?

B.

En fait, avant de rentrer chez moi, sa famille d’accueil, Nadia, m’avait dit qu’Opium avait une peur bleue des escalators. Du coup, c’était vraiment un truc que je voulais travailler parce que j’en emprunte parfois dans le métro. En fait, c’est très rare, mais je n’avais pas envie qu’il reste sur une peur. Si un jour on devait en utiliser, je ne voulais pas que ça lui pose problème. Donc, du coup, j’ai essayé une fois de le faire prendre un escalator et il m’a bluffée. Parce que je voyais qu’il avait peur (il tremblait un petit peu), mais il y est allé ! Donc là, je me suis dit que, vraiment, il se donne à fond dans ce que je demande et ça m’a vraiment touchée.

E.

Ouais, en fait, il a dépassé sa peur pour toi, son appréhension, on va dire. Et aujourd’hui, les escalators, c’est du passé et c’est quelque chose qui gère.

B.

Oui.

E.

Ouais, donc, dès le début, il était à fond pour toi. Et sans pour autant se mettre en danger parce qu’il n’y a rien de dangereux dans les escalators, c’est un peu impressionnant et en effet… Il faut les apprivoiser ! C’est ce qu’on fait, nous, en tant que famille d’accueil : on les fait apprivoiser ces escalators. Et est-ce que parmi, peut être des camarades de pré-classe, tu as fait une ou des rencontres exceptionnelles que tu aurais jamais fait sans Opium ?

B.

Je me suis fait plusieurs amis, dont Manon. C’est un bénéficiaire, qui était avec moi pendant ma classe et ma pré-classe aussi. Et Marine, que je n’ai jamais vu en vrai, mais je lui ai beaucoup parlé par messages et j’ai pu lui poser plein de questions sur le déroulement de la classe, de la remise…

E.

Donc, Marine, qui a Odor, c’est ça ?

B.

Oui.

E.

Avec qui je discute aussi pas mal sur Instagram ! Qui en effet, donne beaucoup d’informations et n’est pas avare – en tout cas dans les échanges – pour nous parler de son quotidien avec Odor (et qui vient du coup, Odor, de la Fondation Frédéric Gaillanne également). Et je crois qu’il y a, chaque année, aussi un parrain ou une marraine pour les classes de remise. De ton côté, c’était qui ?

B.

Muriel Hurtis, c’est une athlète.

E.

Ok, donc t’as eu l’occasion de la rencontrer ?

B.

Oui, elle est venue quand la banque est venue aussi.

E.

D’autres partenaires !

B.

C’est une banque qui finance le 100ème chien.

E.

Donc, tu as été le 100ème binôme, comme on disait tout à l’heure, ce qui a fait l’objet de pas mal de petits reportages. Oui. Et par rapport à ces reportages, on n’en a pas parlé, mais toi aussi, tu fais quelques vidéos, je crois savoir. Est-ce que tu peux nous en parler ?

B.

Moi, je fais des vidéos YouTube sur le handicap et je parle de mon quotidien avec Opium. Donc je parle des Chiens guides, de tout ça. Je donne beaucoup d’astuces sur mon quotidien, je fais beaucoup de vlogs, de trucs comme ça.

E.

Et comment s’appelle ta chaîne, si on veut te suivre ?

B.

Bérébigleuse !

E.

Bérébigleuse, c’est tout à fait ça. Et moi, j’ai adoré regarder. Parce que même si ça ne me concerne pas directement, je trouve ça hyper intéressant de voir tout ce qu’on peut mettre en place. Que ce soit vis à vis de l’école/du collège : tu en parles.Toutes les choses magiques que tu fais avec ton ordinateur pour, quand même, pouvoir suivre (agrandir les documents, etc). Et puis, tu as très bien expliqué aussi comment tu pouvais te repérer sans chien, avant d’avoir Opium, par exemple, je crois dans l’obscurité. Alors tu nous as parlé, au tout début, de ta vision tubulaire (donc tu ne vois quasiment qu’au centre de ton champ de vision) mais tu expliques, dans cette vidéo, comment tu vois dans le noir, en fait.

B.

Oui, c’est vraiment bizarre parce que je suis vraiment éblouie par les grandes lumières. Donc, même un lampadaire dans la rue peut vraiment éblouir, donc la nuit, je suis quasiment aveugle.

E.

Et toi, c’est quelque chose que tu avais déjà travaillé, peut-être ?

B.

Oui, je l’ai travaillé en locomotion.

E.

En locomotion, voilà ! Parce que les perceptions sont très différentes. Et pour te repérer, les indices à prendre dans l’environnement ne sont pas les mêmes. Et c’est ce que tu expliques très bien dans cette vidéo où tu es dans le jardin de chez tes grand-parents, je crois.

B.

Oui.

E.

Ça te permet de montrer un peu ce que tu perçois ou pas avec la connaissance que tu as du lieu le jour, en fait, tout simplement. En tous cas, on ira voir. Je mettrais, dans les notes de l’épisode, le lien vers ta chaîne YouTube « Bérébigleuse ». Est-ce que tu peux nous dire, un peu, les prochaines vidéos que tu penses faire ?

B.

J’ai pensé faire une vidéo vlog avec Opium de tous les lieux de détente. Une routine, parce qu’on me le demande beaucoup, du matin avec Opium. Qu’est-ce que je fais le matin, tout mon trajet de guidage avec lui… Et sinon, je ne sais pas vraiment.En fait, dès que j’ai une idée, je la note.

E.

Bon, ça va revenir après les vacances, tu vas en avoir plein de nouvelles. Avec le lycée, t’auras sûrement d’autres choses aussi à raconter.

B.

Oui.

E.

Mais en tout cas, moi, j’ai hâte de voir les prochains parce que je les ai déjà toutes visionner, celles que tu as mis à disposition. Mais en tout cas, on redit hein la chaîne « Bérébigleuse ». Et je crois que tu es aussi sur Instagram ?

B.

Oui, c’est la même chose : « Bérébigleuse ».

E.

« Bérébigleuse » aussi. Pour finir, je pose toujours une petite question à la fin et je voulais aussi te la poser pour savoir quel était ton pire et ton meilleur moment avec Opium ? Même si ça fait que quelques temps qu’il est à tes côtés.

B.

Le meilleur moment, je pense que c’est soit quand on me l’a remis, soit quand je suis arrivée pour la première fois chez moi avec Opium. C’était vraiment incroyable, je n’y croyais pas ! Et le pire, c’était pendant une balade avec ma famille, du coup, et des amis. On était au Bois de Boulogne, on était assis sur la pelouse, on est dans une grande clairière, un peu. Donc, il y avait Opium, il était à un mètre de moi. Il sentait un peu l’herbe, il mangeait un peu d’herbe et tout. Je tourne la tête, je retourne, on ne le voit pas ! Donc, je commence à m’affoler ; tout le monde a crié : « Opium, Opium ! ». Mais, il ne revient pas… Et en fait, ce qui était vraiment très stressant, c’était que, à quelques mètres, il y avait une route où des voitures passaient à 70 km/h. Je me disais « si Opium va sur la route, c’est fini… » Donc on a appelé au moins je pense… En fait, ça n’a pas duré longtemps, mais, moi, ça me paru une éternité parce que quand on a des moments stressants, comme ça nous paraît une éternité. Du coup, il est revenu et on l’a entendu grâce à sa clochette que je lui met toujours autour du cou en balade.

E.

Donc, grâce à la clochette, vous avez pu repérer dans quel coin il était. Et je crois savoir qu’il n’était finalement pas du tout du coin de la route, heureusement.

B.

Non, il était à l’opposé !

E.

Ha ! Mais ça, on ne pouvait pas le savoir avant de l’entendre. Finalement, tout est bien qui finit bien : il est revenu et maintenant, il est en sécurité. Il n’y a pas de problème.

B.

He ! Oui.

E.

Et ça a du être très flippant !

B.

C’était horrible. J’avais l’impression de tomber dans les pommes ; je ne sentais plus mes jambes. Et c’était le premier week-end où j’ai eu Opium !

E.

Ha ouais ! Et t’as mis en place des stratégies depuis, pour éviter d’avoir cette peur à nouveau ?

B.

Maintenant je le rappelle souvent, quand même.

E.

Ok. Comme ça, tu sais dans quel coin il est à peu près et t’as moins cette peur. Bon bah écoute, merci en tous cas, Bérénice, pour tout ça ! On retient que l’on peut faire la demande en étant mineur. Parce que j’en avais déjà parlé un petit peu d’être mineur ou majeur, justement, avec Timothée. Timothée, lui, dans l’épisode 17, il nous racontait qu’il avait eu son premier chien guide, à peine à ses 18 ans. Je crois qu’il ne les avait pas encore, mais c’est les Chiens guides de l’Ouest qui lui avaient remis Baltik, à l’époque. D’ailleurs, on félicite Timothée au passage, qui vient de décrocher une médaille d’argent aux 100 mètres sur les Paralympiques aux J.O. de Tokyo. J’ai beaucoup pensé à lui ce dernier jour. Et Timothée nous racontait qu’il avait été, du coup, assez agréablement surpris et que sa vie avait beaucoup changé avec l’arrivée de Baltik, même s’il n’avait que 17 ans et demi, ça avait été possible. Mais en général, en effet, pour demander un chien guide en étant mineur (à partir de 12 ans), on s’oriente vers la Fondation Frédéric Gallienne. Et tu nous as tout décrit : du stage de découverte jusqu’au stage de remise en passant par la pré-classe. C’est très riche de savoir toutes ces étapes là et j’espère que ça va pouvoir permettre à d’autres – qui envisagent d’avoir un chien guide en étant adolescent, on va dire – de pouvoir faire leur demande et de ne pas hésiter. Parce que je pense que le mot de la fin est pour toi. Mais si il y a quelque chose à retenir de cette aventure : est-ce que tu le referais ?

B.

Oui, sans hésiter !

E.

On te souhaite beaucoup d’années encore avec Opium. Ça fait quelques mois qu’il est avec toi et vous en avez encore pour une belle aventure ensemble. Merci beaucoup à toi Bérénice, pour tout ça.

B.

Merci à toi ! He !

E.

Et on se dit à très bientôt – parce qu’on n’est pas vraiment loin, au final.

B.

À très bientôt !

E.

À très bientôt.

E.

Et voilà, c’est la fin de cet épisode. Merci à vous de l’avoir écouté. En espérant qu’il vous aura plu. Merci à Bérénice pour sa persévérance dans nos péripéties d’enregistrement et son temps en pleine rentrée au lycée qui me permet aujourd’hui de parler de la Fondation Frédéric Gaillane. Pour compléter votre écoute, vous pouvez retrouver, dès maintenant, plein de photos d’Opium et Bérénice sur mon blog futurchienguide.fr. Et n’hésitez pas à envoyer vos retours sur ce nouvel épisode via mon Instagram @futurchienguide ou dans un avis Apple Podcast. J’adore les découvrir et ça me motive pour continuer ! Et pour faire grandir ce podcast, le meilleur moyen reste encore d’en parler autour de vous, mais aussi de m’identifier sur Instagram lors de vos écoutes : je partage à tous les coups. Alors à très bientôt pour un prochain épisode sur l’univers méconnu des chiens guides d’aveugles.

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